Le projet Leclerc à Moirans : les élus locaux contre leur territoire

Le 26 décembre 2016, le maire de Moirans a accordé un permis de construire à la SCI de la gare de Moirans, en vue de construire un ensemble commercial de 9 000 m² de surface de plancher. Derrière cette SCI, le propriétaire du Leclerc de Comboire (plus de 150 millions d’euros de chiffre d’affaires annuel et moins de 10 millions de masse salariale).

1/ AUX ORIGINES DU PROJET

Ce projet est soutenu par la communauté d’agglomération du Pays Voironnais (CAPV), qui a obtenu le soutien de l’établissement en charge d’élaborer le Schéma de cohérence territoriale (SCoT).

La CAPV a une obsession : construire une très grande surface dans le sud du territoire pour inciter les habitants du Pays Voironnais à faire leurs courses à cet endroit-là plutôt qu’à Saint-Égrève. Ils sont persuadés que cela permettra de créer des emplois.

Les emplois qui seraient créés par Leclerc à Moirans seraient compensés par des suppressions d’emplois à Saint-Égrève mais aussi dans les autres grandes surfaces du Pays Voironnais et par des suppressions d’emplois dans les petits commerces de centre-ville. Globalement, on doit s’attendre à une diminution du nombre d’emplois. À cela s’ajouterait une déstructuration des villes consécutive aux fermetures des commerces de détail. Tout cela pour une implantation financée avec des fonds publics.

La CAPV n’arrivait pas à conclure. Jusqu’à ce que le projet de création d’un immense ensemble commercial à Saint-Martin d’Hères, le projet Neyrpic, ne soit accepté dans le cadre d’un arrangement entre le président socialiste de la Métro et le maire communiste de Saint-Martin d’Hères. Le projet Neyrpic et ses 24 000 m² de surfaces de vente, n’aurait jamais dû être accepté mais il l’a été. Les dirigeants de la CAPV ne l’ont pas combattu. Ils en ont profité pour demander des compensations du type : si on accorde un passe-droit pour Neyrpic, alors il faut que nous aussi ayons un passe-droit.

Le résultat a été l’extension de la zone commerciale de Colombe (que les dirigeants de la CAPV combattaient, mais à chacun son passe-droit) ; une extension limitée de la zone des Blanchisseries à Voiron ; le classement des faubourgs est de Moirans en zone centrale, ce qui permet d’y implanter des commerces de centre-ville.

Autrement dit, avec cet arrangement, la zone commerciale périphérique de Moirans ne serait pas une zone périphérique puisque le SCoT la classe en zone centrale. Les dégâts seront évidemment les mêmes.

2/ L’AUTORISATION COMMERCIALE ET LE PERMIS DE CONSTRUIRE

L’ouverture de commerces d’une surface de vente supérieure à 1 000 m² était, jusqu’au 15 février 2015, soumise à une double approbation : l’autorisation commerciale et, une fois l’autorisation accordée, le permis de construire.

Le 11 décembre 2013, la commission départementale d’aménagement commercial (CDAC) a refusé le projet de création d’un Leclerc à Moirans présenté par la SCI de la gare de Moirans.

Le 1er avril 2014, la commission nationale d’aménagement commercial (CNAC) a rejeté un recours du promoteur sur le rejet de la CDAC aux motifs que le projet se situera à 1,8 km du centre-ville, que cette réalisation apparaissait prématurée au regard du projet d’initiative publique d’aménagement du quartier de la gare.

Saisie à nouveau, la CDAC a approuvé le projet le 3 février 2015.

Le 16 juillet 2015, rejetant divers recours, la CNAC a autorisé le projet, confirmant une décision de la CDAC au motif que « le pétitionnaire justifie du démarrage des travaux de la gare de Moirans, et du pôle d’échanges multimodal ; qu’ainsi son projet n’encourt plus le grief de prématurité que la commission lui avait précédemment opposé ; que le projet commercial s’inscrit dans le projet, plus vaste et mixte, d’aménagement du quartier de la gare, comprenant des logements et des services ; (…) que le volet développement durable, avec des espaces verts représentant désormais 32 % de l’emprise foncière est globalement satisfaisant ».

Le 23 juillet 2016, la SCI de la gare de Moirans a déposé un permis de construire.

Le permis de construire a été accordé le 26 décembre 2016.

Le 21 février 2017, la cour administrative d’appel de Lyon a rejeté le recours de l’Union rivoise des commerçants et artisans et celui de la société Atac contre la décision de la CNAC : « s’agissant des projets soumis à autorisation d’exploitation commerciale et nécessitant un permis de construire pour lesquels la demande d’autorisation d’exploitation commerciale ou la demande de permis de construire était en cours d’instruction le 15 février 2015 ou a été déposée après cette date, c’est le permis de construire qui tient lieu d’autorisation d’exploitation commerciale lorsque la commission compétente s’est déclarée favorable au projet ; qu’il suit de là qu’à compter de cette même date, seul le permis de construire, qui vaut autorisation d’exploitation commerciale lorsqu’un avis favorable a été délivré, peut faire l’objet du recours contentieux visé par les dispositions de l’article L. 600-1-4 du code de l’urbanisme citées au point 2 ; que, par suite, une requête dirigée contre un avis ou une autorisation valant avis concernant de tels projets est irrecevable ».

La cour administrative d’appel renvoie les demandeurs à attaquer le permis de construire s’ils le souhaitent (c’est ce qu’ils ont fait).

Désormais, la procédure consiste à présenter un dossier qui vaut à la fois demande d’autorisation commerciale et demande de permis de construire ; si l’autorisation commerciale est refusée, le permis ne peut pas être accordé.

Les possibilités de recours sont assez strictes : les commerçants ne peuvent contester le permis qu’en soulevant des arguments (on dit des moyens) contestant la légalité de l’autorisation commerciale (parce qu’elle ne respecte pas le code de commerce) ; les voisins ne peuvent soulever que des arguments contestant la légalité de l’autorisation de construire (parce qu’elle ne respecte pas le code de l’urbanisme).

Heureusement, les associations ne sont pas tenues par ces restrictions mais il faut qu’elles existent avant le dépôt du dossier et que leurs statuts les autorisent à contester ce type de décisions.

3/ LE PROJET EST DIFFÉRENT DE CELUI EXAMINÉ EN CNAC

Le permis de construire a été délivré au vu de l’avis favorable de la CNAC.

Le dossier présenté à la CNAC portait sur la construction de trois bâtiments d’une surface totale de 8 362 m² dont 5 000 m² de surface de vente ainsi répartis : un bâtiment de 5 862 m² dont 2 500 m² de surface de vente, des réserves (2 136 m²), un laboratoire (570 m²) et des bureaux et locaux sociaux (362 m²), un autre de 1 000 m² de surface de vente et enfin un troisième de 1 500 m² de surface de vente.

Il comprenait aussi un espace vert (en haut à gauche sur le plan) distinct des autres espaces engazonnés, dont la CNAC avait tenu compte pour prendre sa décision (considérant que le volet développement durable, avec des espaces verts représentant désormais 32 % de l’emprise foncière est globalement satisfaisant).

projet présenté en CNAC

Le projet qui a fait l’objet du permis de construire porte sur la construction de 9 000 m² de surface de plancher, répartie en deux bâtiments : l’un d’une emprise au sol de 6 347 m² (dont 2 500 m² de surface de vente) et l’autre d’une emprise au sol de 2 975 m² (dont 2 500 m² de surface de vente). La surface du terrain est différente, les surfaces construites sont plus importantes, leur répartition est différente, l’espace vert a disparu.

Projet objet du permis de construire

(les parties en vert foncé correspondent à une partie des bâtiments, pas à des espaces verts)

Le maire ne pouvait accorder le permis de construire alors que le projet diffère de celui sur lequel la CNAC a donné son avis, ce dont il avait connaissance.

Il résulte de l’article L.752-15 du code de commerce que « Une nouvelle demande est nécessaire lorsque le projet, en cours d’instruction ou dans sa réalisation, subit des modifications substantielles, du fait du pétitionnaire, au regard de l’un des critères énoncés à l’article L. 752-6, ou dans la nature des surfaces de vente. »

La décision de la CNAC indiquait : « considérant que le volet développement durable, avec des espaces verts représentant désormais 32 % de l’emprise foncière, est globalement satisfaisant ».

En effet, le projet soumis à la CNAC était ainsi présenté :

Dans la notice sur la gestion des eaux pluviales jointe à la demande du permis de construire, il est indiqué

Il y a bien réduction importante de la surface d’espaces verts, modification de sa composition, accroissement de la zone imperméable. Il y a donc bien eu modification substantielle du fait du pétitionnaire, au regard de l’un des critères énoncés à l’article L 752-6 du code de commerce, alors même que les espaces verts étaient mentionnés à l’appui de l’avis favorable de la CNAC.

Le pétitionnaire aurait dû déposer un nouveau dossier devant la CDAC.

En résumé, le dossier présenté à l’appui de la demande de permis de construire est différent de celui présenté à l’appui de la demande d’autorisation commerciale. Le pétitionnaire devait présenter une nouvelle demande d’autorisation commerciale et le maire de Moirans ne pouvait accorder le permis de construire.

4/ LE PROJET EST « PRÉMATURÉ »

La CNAC avait relevé, dans sa décision du 16 juillet 2015, que « le pétitionnaire justifie du démarrage des travaux de la gare de Moirans, et du pôle d’échanges multimodal ; qu’ainsi son projet n’encourt plus le grief de prématurité que la commission lui avait précédemment opposé » (dans sa décision du 1er avril 2014).

Elle confond ainsi les travaux d’aménagement de la gare, dont la finalité est de faciliter l’accès à la gare pour les voyageurs, avec l’aménagement du quartier de la gare, dont la finalité est dans un premier temps d’accueillir le Leclerc et, dans des phases ultérieurs, d’accueillir d’autres surfaces commerciales périphériques et des logements.

La relation entre le parking de la gare et le Leclerc n’est pas celle que la CNAC avait imaginée : le parking n’est pas la première phase de l’aménagement du quartier de la gare. Par contre, si le Leclerc était réalisé, il aurait un impact sur l’usage du parking : le 29 novembre 2016, devant le conseil communautaire, le vice-président aux politiques de déplacement de la Communauté d’agglomération du Pays Voironnais déclarait : « À Moirans, un magasin Leclerc va se construire à 200 mètres. Si l’accès au parking est libre, tout le personnel s’y garera. Et on ne pourra rien faire s’il n’y a pas un contrôle d’accès de ces parkings ». Il n’y a pas de relation de complémentarité mais de concurrence. Il serait préférable, pour l’accès à la gare, que le Leclerc ne soit pas construit.

Si les travaux à la gare sont en cours, il n’en va pas de même du quartier de la gare, qui en est encore au stade des études pré-opérationnelles.

L’aménagement du quartier de la gare, qui se situe à la périphérie de Moirans (il y a une autre gare en centre-ville), a été prévu par le SCoT, qui a classé cet espace périphérique en « zone centrale ». Ce classement, contestable, permet la construction de commerces à condition d’y construire aussi des logements. L’aménagement de ce secteur serait fait sous maîtrise d’ouvrage intercommunale (le principe en a été acté et on sait déjà que l’opération sera déficitaire : déficitaire de 4 940 000 € selon la dernière estimation, qui ne tient pas compte des coûts de restructuration des voiries à la charge du Département) mais aucune décision formelle autre que d’études (qui ne sont pas toutes achevées) n’a été prise.

Il est bien prévu des orientations d’aménagement et de programmation dans le cadre de la révision du PLU de Moirans mais là encore, rien n’a été décidé : la révision du PLU est toujours à l’étude et elle ne devrait pas aboutir avant la fin 2017. Ce n’est qu’à ce moment-là que la Communauté d’agglomération pourra prendre la décision de réaliser – ou pas – cette opération.

La CNAC a commis une erreur manifeste en estimant que « le pétitionnaire justifie du démarrage des travaux de la gare de Moirans, et du pôle d’échanges multimodal ; qu’ainsi son projet n’encourt plus le grief de prématurité que la commission lui avait précédemment opposé ; que le projet commercial s’inscrit dans le projet, plus vaste et mixte, d’aménagement du quartier de la gare, comprenant des logements et des services ». Elle a dénaturé les faits en prétendant que les travaux de la gare étaient une partie du projet d’aménagement du quartier de la gare.

En résumé, la décision favorable de la CNAC est illégale. Le maire de Moirans ne pouvait pas s’en prévaloir, d’autant qu’il ne pouvait ignorer l’erreur commise par la CNAC. Il ne pouvait accorder un permis de construire alors même qu’il n’a pas rendu le PLU compatible avec le SCoT ; alors même que les orientations d’aménagement et de programmation envisagées sur la zone n’avaient pas été adoptées au moment de la signature du permis de construire (elles ne le sont toujours pas) ; que le financement public de l’opération, pour autant qu’il serait légal en tant qu’il bénéficierait à des entreprises, n’est pas acquis.

5/ UN RISQUE ACCRU D’INONDATION

Le terrain sur lequel l’ensemble commercial doit être construit est situé dans un secteur inondable. D’ailleurs, autrefois, il y avait un étang à cet endroit. Une partie de la parcelle est située en zone de risque élevé d’inondation.

La question de l’inondabilité est une préoccupation : le projet d’aménagement du quartier de la gare est d’ailleurs subordonné aux résultats d’une étude sur la question.

Le permis de construire se borne à préciser que la SCI de la gare devra respecter les prescriptions énoncées par l’association syndicale des digues de Voreppe à Moirans. Le maire ne pouvait agir ainsi car il disposait des informations lui permettant de conclure que ces prescriptions ne seraient pas respectées.

La SCI de la gare produit en effet une « notice concernant la gestion des eaux pluviales » dont le plan suivant est extrait, qui mentionne la création d’une noue de 1 050 m³.

Le plan fait apparaître un espace de rétention (une noue) parallèle à la rue Vincent Martin (vertical sur le plan), qui semble se prolonger au nord par une noue un peu moins large (en biais sur le plan).

Extrait de la notice concernant la gestion des eaux pluviales

Le pétitionnaire a fourni un plan d’ensemble de son projet et des plans de coupe : la noue devrait y figurer.

Les deux extraits du plan d’ensemble, reproduits ci-dessous à la même échelle, mentionnent la coupe 03-20 devant traverser l’extension nord de la noue ainsi que la coupe 03-10 coupant perpendiculairement la noue à son endroit le plus large.

Extrait du plan de masse

La coupe 03-20 ci-dessous fait bien apparaître une surface non étanche, avec des buissons : il n’y a pas de noue.

Extrait de la coupe 03-20

La coupe 03-10 passe sur la noue.

Extrait du plan de masse

La coupe 03-10 fait bien apparaître la noue :

Toutefois, les dimensions de celle-ci sont, comme on pouvait s’y attendre, incohérentes avec le volume annoncé (qui est, rappelons-le de 1 050 m³). En effet, la noue a une profondeur maximale de 1 m par rapport au terrain naturel et donc de 1m50 au maximum par rapport au sol surélevé, et une largeur inférieure à 5 m. Or elle mesure moins de 100 m de long : cela représente moins de la moitié du volume allégué.

Ce n’est pas tout : les plans montrent que la servitude de 4 mètres de part et d’autre des ruisseaux (et pas de leur centre) n’est pas respectée.

C’est d’autant plus inquiétant qu’il arrive déjà que le ruisseau de l’Archat déborde en aval du site où le centre commercial doit être construit : la création de la zone commerciale, et d’une manière générale, l’urbanisation excessive du quartier de la gare, telle qu’elle semble envisagée, ne fera qu’aggraver la situation.

En résumé, la construction envisagée de l’ensemble commercial va accroître le risque d’inondation, le projet ne permettant pas un traitement des eaux pluviales sur la parcelle, alors que le réseau actuel est saturé. En l’état, le permis de construire ne pouvait pas être accordé.

6/ UN PROBLÈME DE DESSERTE

L’ensemble commercial étant construit dans les faubourgs de la Ville, son accessibilité doit être assurée pas seulement en voiture mais aussi par les transports en commun et les modes doux.

En réalité, ce secteur n’est desservi que de manière très limitée par les transports en commun urbains, bien trop limitée pour que ce soit un mode de transport utile pour rejoindre la zone commerciale.

L’éloignement du centre-ville rend également peu crédible l’accès à pied, sauf pour les personnes habitant à proximité.

De fait, l’essentiel des accès se ferait en voiture, ce qui ne rentre pas dans les critères de l’article L 752-6 du code de commerce. C’est à tort que la CNAC n’a pas soulevé ce point.

L’accès en voiture n’est pas lui-même assuré.

La SCI de la gare, dans son dossier à la CNAC, a fourni une étude de trafic peu pertinente puisqu’elle ne portait que sur l’impact de l’ensemble commercial sur la rue Vincent Martin. Elle n’a pas fourni d’études d’impact sur la RD 1085, une route très saturée qui devrait supporter des cisaillements de circulation. La CNAC aurait dû prendre en compte cette insuffisance.

Les collectivités locales se sont penchées sur la question de la RD 1085 mais de manière incomplète. En tout état de cause, les projets de réaménagement de la RD 1085, présentés comme liés à l’aménagement du quartier de la gare et donc à l’implantation du Leclerc, évoquent diverses hypothèses mais aucune ne respecte les dispositions de l’article L 228-2 du code de l’environnement aux termes duquel « À l’occasion des réalisations ou des rénovations des voies urbaines, à l’exception des autoroutes et voies rapides, doivent être mis au point des itinéraires cyclables pourvus d’aménagements sous forme de pistes, marquages au sol ou couloirs indépendants, en fonction des besoins et contraintes de la circulation ».

Il semble bien, en effet, que la largeur disponible ne permet pas d’assurer en même temps l’aménagement cyclable et la desserte de la zone commerciale. Mais l’aménagement cyclable est une obligation légale ; la construction de grades surfaces périphériques ne répond à aucun intérêt public, bien au contraire.

En résumé, parce que la desserte de l’ensemble commercial par les modes doux et les transports en commun est insuffisante, la CNAC aurait dû refuser l’autorisation commerciale et le maire de Moirans aurait dû refuser le permis de construire.

Le maire de Moirans devait également refuser le permis de construire parce que la desserte de cet ensemble est incompatible avec le respect de l’article L 228-2 du code de l’environnement.

7/ UNE PASSOIRE THERMIQUE CERTIFIÉE RT2012

La société produit une attestation de prise en compte de la RT2012. Les données mentionnées sont telles que la commune ne pouvait ignorer qu’elles étaient douteuses sans avoir à procéder à une quelconque instruction.

Rappelons que la réglementation thermique RT 2012 impose un haut niveau de performance énergétique sur les bâtiments neufs (elle sera remplacée dans quelques années par une réglementation plus exigeante, la RT 2020). Les niveaux de performances dépendent de la nature du bâtiment et de la zone climatique. Chez nous, un logement neuf ne peut pas consommer plus de 50 kWh d’énergie primaire par m² et par an pour le chauffage, le refroidissement, la ventilation, la fourniture d’eau chaude et l’éclairage.

Les deux ensembles de bâtiments seront chauffés et climatisés par la même technique : « rooftop haute performance intégré en toiture ». Pourtant, un des bâtiments affiche une consommation d’énergie primaire de 150 kWh par m² et par an pour 3 165 m² pour un coût de 18 000 € ; l’autre, 350 kWh par m² et par an pour 6 459 m², pour un coût de 150 000 €. Ces donnés sont très différentes de celles qui ont été fournies dans le dossier soumis à la CNAC. Rien n’explique cette différence très étonnante ; à quoi il faut ajouter la différence de coût de l’énergie : 5,89 cts le kWh dans un cas ; 10,30 cts dans l’autre.

De plus, il faut noter que 350 kWh correspondent à une étiquette énergie de classe E (Annexe 3 de l’arrêté du 15 septembre 2006 relatif au diagnostic de performance énergétique pour les bâtiments existants proposés à la vente en France métropolitaine) : la commune ne pouvait, sans demander des explications, tenir pour acquis qu’un bâtiment de classe E soit conforme à la RT 2012.

Cela ne peut en outre permettre de considérer que le pétitionnaire a rempli les conditions d’efficacité énergétique prévues à l’article L 752-6 du code de commerce aux termes duquel, lorsqu’elle examine un dossier, la commission départementale d’aménagement commercial prend en considération (…) 2° En matière de développement durable : a) La qualité environnementale du projet, notamment du point de vue de la performance énergétique, du recours le plus large qui soit aux énergies renouvelables (…).

En résumé, face à des données manifestement douteuses et incohérentes, le maire ne pouvait considérer l’attestation fournie comme satisfaisant les obligations réglementaires.

Il ne pouvait pas plus se prévaloir de l’avis favorable de la CNAC alors qu’il est patent que le pétitionnaire ne répond pas aux conditions fixées à l’article L 752-6 du code de commerce.

La CNAC elle-même s’est prononcée sur un dossier différent mais encore plus alarmant puisque, malgré l’utilisation (certes très modérée) d’énergie renouvelable, les étiquettes énergétiques mentionnaient une consommation prévisionnelle d’énergie primaire de 272 kWh d’énergie primaire par m² et par an pour les bâtiments regroupant la moitié de la surface de vente et 427 kWh pour l’autre, ce qui correspond respectivement aux étiquettes énergétiques E et F. Elle devait refuser l’autorisation, rendant impossible l’octroi du permis de construire.

8/ UN HYPERMARCHÉ, PAS UNE MOYENNE SURFACE 

Le SCoT interdit de réaliser des surfaces commerciales de plus de 2 500 m² à Moirans.

Il s’agit d’éviter de déstructurer les villes par la création de zones commerciales périphériques au fort pouvoir attractif.

On a vu que le SCoT a résolu une partie de la question en qualifiant cette périphérie de Moirans de zone centrale. Pour autant, l’obstacle des 2 500 m² demeure.

Or le permis de construire porte sur une surface de vente de 5 000 m².

Pourtant, toute la communication de la CAPV a porté sur la création d’une surface commerciale de 2 500 m². Quant au maire de Moirans, il a prétendu qu’il s’agissait d’implanter une moyenne surface.

Olivier BOURET

 

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